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JOURNAL

DES AVOUÉS

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RECUEIL CRITIQUE DE PROCÉDURE CIVILE,

COMMERCIALE ET ADMINISTRATIVE;

RÉDIGÉ

PAR UNE RÉUNION DE JURISCONSULTES-

TROFSMÈitrjB sénrjs.

LIBRARY^

TOME DIXIÈME. ;. TiE GCURT

«f CANADA. 1869

( Tome 94^ de la collection. 58« année.)

PARIS,

LES BUREAUX DU JOURNAL

sont

A LA LIBRAIRIE GÉNÉRALE DE JURISPRUDENCE DU COSSE, IlIâRCHAL et C'*, libraires delà coub de cassation,

Place Daupbine, t9.

1 869

Les cahiers sont déposés, conformément à la toi ; toute reproduction d'un article de doctrine, dissertation, observation, ou question pro- posée, sera considérée comme contrefaçon»

I

IMPRIMERIE DE COSSE ET J. UCMAISE, RUE CHRISTINE, 'i.

JOURNAL

DES AVOUÉS.

Art. 1375. M. CHAUYEAU (ADOLPHE).

La faculté de droit de Toulouse vicDt de perdre un de ses plus éminents professeurs; la science du droit, et la procédure spé- cialement, un de ses plus féconds et habiles interprètes 3 le barreau, un de ses membres les plus laborieux. A ses travaux deprofesseur et d'auteur, M. Chauveau joignait, en effet, Texer- cice de la plus belle des professions libérales, celle d'avocat, réalisant ainsi la devise: le travail, c'est la vie..., qu'il avait inscrite sur sa thèse de doctorat, devise qui résume parfaite- ment toute son existence. Sa vie a donc été entièrement con- sacrée à la science du droit, et sa merveilleuse aptitude au travail, sa vive intelligence, la prodigieuse activité de son esprit l'ont dotée de travaux considérables et remarquables.

à Poitiers, le 29 mai 1802, M. Chauveau (Adolphe) fît ses études de droit à la faculté de sa ville natale, un élé- gant et illustre professeur de procédure, M. Boncenne, lui voua une vive affection, qui le porta à s'occuper de la branche du droit qui a fait la célébrité du maître et de l'élève. Reçu licencié en droit à 19 ans, il débuta au barreau de Poitiers, et ce fut en 1823 qu'il se fit inscrire au tableau des avocats de la Cour royale de Paris, il acquit une réputation honorable.

En 1830, et encore fort jeune, M. Chauveau entra au barreau du Conseil d'Etat et de la Cour de cassation, et ne tarda pas à s'y distinguer. Les connaissances qu'il y acquit bientôt dans toutes les matières administratives, jointes aux travaux estimés qu'il avait déjà publiés , le signalèrent au choix d'un ministre éclairé, M. de Salvandy, quand, en 1838, il voulut rendre à la faculté de droit de Toulouse une chaire de droit administratif qui y avait été établie en 1829, mais qui avait été supprimée l'année suivante. M. Chauveau fut, alors, promu

au

4 ( ART. 1375. )

à cette chaire que, depuis, c'est-à-dire pendant trente ans, il a occupée sans interruption, et il a laissé des regrets una- nimes.

M. Chauveau a étendu sur une foule d'objets divers le do- maine de ses connaissances, et on est vraiment étonné de la fécondité de son esprit, des ressources variées et toujours utiles qu'il en savait tirer, et des œuvres nombreuses qu'il a produites et qui attestent tout ce que peuvent l'énergie, la puissance de la volonté pour le travail.

Suivant les inspirations qu'il avait puisées aux leçons de M. Boncenne, M. Chauveau commença par devenir, en 1824, le rédacteur en chef d'un journal important de procédure, du Journal des Avoués, fondé par M. Cofïinières, jurisconsulte qui, lui aussi, a laissé un bon souvenir. C'est dans ce journal, qu'il a rédigé soit seul, soit en collaboration, jusqu'en 1860, c'est-à-dire pendant trente-six ans, et auquel il n'a cessé de porter le même intérêt, d'accorder toute sa sollicitude, que M. Chauveau a examiné et traité les questions les plus ardues, les points nouveaux de procédure, qu'il a éclairés de ses re- cherches, de ses j udicieux aperçus, de ses profondes réflexions. C'est ce journal qui a été le premier fondement de la popula- rité qu'il a acquise dans la pratique, surtout parmi les officiers ministériels, et que nul autre auteur s'étant occupé de procé- dure ne paraît avoir atteinte, popularité que la continuation de l'œuvre du savant professeur de Rennes, les Lois de la pro- cédure civile, continuation pour laquelle M. Carré l'avait lui-même choisi, a rendue complète, en unissant insépa- rablement le nom de M. Chauveau à celui de Carré; quand, eu effets ou cite une opinion de M. Chauveau exprimée dans les Lois de la procédure, on dit toujours, généralement : Chau- veau sur Carré, ou Carré et Chauveau j et l'éminent profes- seur de Toulouse s'enorgueillissait lui-même de l'adjonction de son nom à celui de Carré.

Avant de faire paraître son travail sur Carré, M. Chauveau publia différents ouvrages : le Code forestier expliqué (1 vol. in-8° 1827), le Manuel de la contrainte par corps (1 vol. in-l8 1829), le Code de la saisie immobilière (1 vol. in-8° 1829), le Commentaire du tarif en matière civile (2 vol. in-8" 1831).

La législation criminelle fut aussi l'objet de ses études. Après avoir publié le Code pénal progressif (1 vol. in-8° 1832), M. Chauveau a fait, en collaboration avec M. Faustin HéJie, l'un de nos magistrats les plus distingués, la Théorie du Code pénal (4834-1843), dont la édition (7 vol. in-8°) a paru en 1863. Ce travail l'a placé au rang de nos meilleurs criminalisles.

En même temps qu'il s'occupait de droit pénal, M. Chauveau

( ART. 1375. ) 5

publiait, en 1837, une table générale du Journal des Avoués, qu'il avait commencée en 1825, sous le titre de Dictionnaire de procédure (1 fort vol. in-S") : c'est une œuvre remarquable de patience et de persévérance.

Le complément des Lois de la procédure civile, auquel, pen- dant longtemps et concurremment avec d'autres ouvrages, M. Chauveau a appliqué son esprit, est peut-être le travail le plus considérable qu'il ait entrepris. La publication en a été commencée en 1839. L'œuvre de Carré est restée telle qu'elle était; M. Chauveau l'a complétée en y ajoutant les change- ments, les modifications résultant de la législation nouvelle, de la jurisprudence et de la doctrine. M. Chauveau avait une grande vénération pour M. Carré; mais il n'en a pas moins conservé une entière indépendance. Il a adopté et défendu l'opi- nion de M. Carré, toutes les fois qu'il lui a paru qu'elle devait être maintenue; il l'a combattue, quand il a pensé qu'elle était contestable, susceptible de critiques. A côté de l'opinion de Carré, se trouve donc toujours celle de M. Chauveau. Les additions apportées par ce dernier au texte primitif de Carré forment aujourd'hui la majeure partie du livre, qui est arrivé à sa i^ édition, et qui a été de nouveau mis au courant de la législation, de la jurisprudence et de la doctrine, par un Sup- plément-p\ih\ié en 1862. C'est, bien incontestablement, l'ou- vrage le plus complet qui existe sur la procédure civile, et en disant que l'opinion de M. Chauveau en cette matière est gé- néralement acceptée comme une autorité, ce n'est que cons- tater un fait.

M. Chauveau, que la position des officiers ministériels a toujours préoccupé, a pourvu à tous les besoins de la pra- tique. La nature vive et ardente de son intelligence ne se prêtait pas au repos. Ainsi, à côté des Lois de la procédure, vient se placer le Formulaire général et complet (2 vol. in-8% publiés en 1852-1853), traité pratique de procédure civile et commerciale, annoté de toutes les opinions émises dans les Lois de la procédure civile et dans le Journal des Avoués, et revu par M. Glandaz, alors président de la chambre des avoués de Paris. Ce formulaire, qui est la mise en action des règles enseignées dans les deux ouvrages précités, ne pouvait pas ne point avoir le même succès. Aussi est-ce aujourd'hui la S" édition qui est en vente.

La loi du 21 mai 1858 a modlQé profondément le titre de l'Ordre du Code de procédure civile, et cette matière exigeait, de la part de M. Chauveau, un commentaire nouveau. Ce commentaire ne s'est pas fait attendre; il a été publié en 1859, sous le titre : De la procédure de l'ordre (1 vol. in-8°). Il ne le cède en rien aux ouvrages précédents du savant professeur, et, de tous les commentaires auxquels la loi du 21 mai 1858

6 ( ART. 1375. )

a donné lieu, la Procédure de l'ordre est encore celui qui con- tient le plus de documents et de solutions pratiques.

Le Code de la saisie immobilière, publié en 1829, devait aussi être remanié, surtout en présence de la loi du 2 mai 1841, qui a modifié les titres de la saisie immobilière et des ventes judiciaires d'immeubles du" Code de procédure, et des dispositions nouvelles de la loi du 21 mai 1858 sur les ventes judiciaires d'immeubles, M. Chauveau n'a pas failli à cette tâche, et l'année 1861 a vu paraître la 3^ édition du Code de la saisie im^nobilière et de toutes les ventes judiciaires de biens immeubles (2 vol. in-8»).

Le Commentaire du tarif en matière civile, publié en 1831, était depuis longtemps épuisé, et une nouvelle édition en était impatiemment attendue. Retardée par la multiplicité des tra- vaux qui ont absorbé l'existence de M. Chauveau, celle édition est venue, en 1864, compléter la série de ses œuvres sur la procédure civile. Pour celle édition, composée de deux forts volumes in-8% M. Chauveau a eu recours à la collaboration de M. Godoffre, avocat, chef de division de la préfecture de la Haute-Garonne et un des anciens rédacteurs du Journal des. Avoués.

L'enseignement du droit administratif que M. Chauveau eut l'honneur d'inaugurer dans la faculté de droit de Toulouse et qu'il sut rendre si intéressant, lui a fourni également l'occa- sion d'enrichir cette branche de notre législation d'ouvrages non moins remarquables et non moins utiles que ceux qui viennent d'être mentionnés ; tels sont : les Principes de com- pétence et de juridiction administratives (1841-1845 3 vol. in-8°), elle Code d'instruction admistrative ou Lois de la pro- cédure administrative, complément naturel des Lois de lapro~ cédure civile. Trois éditions, la dernière publiée en 1867, ont couronnélesviccèsiu. Code.d'instruction administrative, «celui de vos livres, écrivait M. Vivien à M. Chauveau, que j'aime le mieux,... parce que c'est celui vous avez le plus mis du vôtre et votre esprit a été le moins détourné par la juris- prudence et les citations ». Enfin, en 1853, M. Chauveau a fondé, sous le titre de Journal du droit administratif, une pu- blication mensuelle de la plus haute utilité, ayant pour objet de mettre le droit administratif à la portée de tout le monde, journal qu'il a rédigé, seul, jusqu'à sa mort.

M. Chauveau est encore l'auteur d'un Essai sur le régime des eaux navigables et non navigables (1859 Broch. in-S"), dont il a été fait un éloge mérité, et d'un Commentaire de la loi du 'l juin. 1862 (1863— Broch. in-S"), relative à l'impôt sur les voitures et chevaux.

Une existence si remplie, tant de travaux si recherchés et si estimés, méritaient bien d'être récompensés.

( ART. laTG. ) 7

M. Chauveau était depuis longtemps membre de la Légion d'honneur, et avait été, il y a quelques années, nommé doyen de la faculté de droit de Toulouse, fonctions dans lesquelles il se concilia toutes les sympathies des professeurs et des étu- diants.

M. Chauveau est mort à l'âge de 66 ans, à un âge il au- rait pu encore faire tant de choses et rendre par de nouveaux travaux de nouveaux services. Cette perle prématurée, qui est pour sa famille une cause de si vifs et légitimes regrets, est aussi pour la science du droit une perte irréparable.

Puisse la vie de cet illustre professeur et jurisconsulte qui, par ses travaux incessants, a tant fait pour la science du droit, et qui toujours est resté l'esclave du devoir, servir de modèle à ceux qui viendront après lui I Adrien Harel.

Art. 1376. Législation industrielle.

Conseils de prud'hommes, contestations, actes, jugements, exécution, timbre, enregistrement.

Une protection spéciale a toujours été, dans notre législa- tion, accordée aux plaideurs devant la juridiction des 'prud'- hommes.

Ainsi, le décret du 11 juin 1809, qui les institue, avait ré- duit d'une manière assez notable les droits d'enregistrement à percevoir par le fisc, et une décision du ministre des finances, du 20 juin de la même année, avait prescrit l'enregistrement gratis toutes les fois que l'objet de la contestation n'excédait pas 25 fr.

La loi du 7 août 1850 n'est que le développement naturel de ce principe, et ce développement était utile, car, malgré la faveur résultant du décret et de la décision précités, les avances à faire devant les prud'hommes étaient encore une charge trop lourde pour un grand nombre de justiciables.

L'art. 1" de cette loi est ainsi conçu : « Dans les contesta- tions entre patrons et ouvriers devant les conseils de prud'- hommes, les actes de procédure ainsi que les jugements et les actes nécessaires à leur exécution seront rédigés sur papier visé pour timbre, conformément à l'art. 70 de la loi du 22 frim. an vu. L'enregistrement aura lieu en débet. » Aux termes de l'art. 3, le visa pour timbre est donné sur l'original au moment de son enregistrement.

La loi du 7 août 1850, dont le bénéfice doit demeurer dans les limites des contestations qui s'élèvent soit entre patrons et ouvriers, soit entre ouvriers seulement, a été une pre- mière application à ces contestations de l'assistance judi- ciaire; plus tard, en effet, elle a été étendue, par la loi sur

à ( ART. 1376. )

l'assistance judiciaire, du 22 janv. 1851 (art. 27), à toutes les causes qui sont de la compétence des conseils de prud'hommes et dont les juges de paix sont saisis dans les localités ces conseils ne sont pas établis.

Ces deux lois ont évidemment le même esprit j l'ouvrier y est considéré comme indigent; le législateur a entendu le traiter dans l'une et dans l'autre avec la même faveur au point de vue du timbre et de l'enregistrement des actes nécessaires à l'instance.

Les mots actes de procédure, dont il s'est servi dans l'art. 1«', ci-dessus rappelé, de la loi du 7 août 1850, y ont été employés dans un sens général, exclusif de toute distinction entre les exploits proprement dits et les actes qui doivent être produits pour l'instruction et la solution de la contestation : ainsi, ils pe comprennent pas seulement la citation introductive de J'instance et toutes les notifications qui peuvent en être la suite, mais aussi le traité en vertu duquel la citation est si- gnifiée.

Autrement, l'ouvrier, que le législateur a lui-même réputé indigent, s'il devait préalablement faire viser pour timbre et enregistrer au comptant le traité intervenu entre lui et son patron, ne jouirait pas, pour plaider, d'une assistance égale à celle des autres indigents ; ce serait aller contre l'intention du législateur, qui, en se montrant favorable à l'ouvrier, n'a pu admettre de restrictions qui entraveraient l'exercice de son action et pourraient même devenir un obstacle à cet exer- cice.

Je crois donc, contrairement à un jugement du tribunal civil de la Seine, du 21 août 1861 [Journ. des Huiss.^ t. 45 [1864], p. 336), que l'huissier, qui est chargé de signifier une citation devant un conseil de prud'hommes, doit pouvoir faire viser pour timbre et enregistrer en débet le traité en vertu duquel il agit, en même temps que l'original de la citation, sans être exposé à une amende et au paiement du droit : l'es- prit et les termes de l'art. !«' de la loi du 7 août 1850 me paraissent exclure l'application, ici, des art. 23, 42 et 47 de la loi du 22 frim. an vu.

Le jugement qui intervient sur cette citation doit également être enregistré en débet, aussi bien pour le droit de titre que pour le droit de condamnation.

Devant les juges de paix, qui sont saisis de causes de la compétence des conseils de prud'hommes dans les lieux ces conseils n'existent pas, l'art, l^' de la loi du 7 août 185C doit recevoir la même application, sans que les parties soient obligées de se faire admettre au bénéfice de l'assistance judi- ciaire.

Mais l'art. 1*' de la loi du 7 août 1850 donne lieu à une autre

( ART. 137G. ) 9

(Uniculté, non moins sérieuse, et qui consiste à savoir ce qu'on doit entendre par actes nécessaires à Vexécution des jugements des conseils de prud'hommes.

Quelque favorables que soient les dispositions de cette loi, il me semble que l'application ne peut, cependant, en être faite aux actes qui, quoique la conséquence d'une exécution, constituent par eux-mêmes une instance différente^ portée devant une juridiction différente.

Ainsi, parmi les actes nécessaires à T exécution des jugements rendus par les conseils de prudliommes, il n'est pas douteux qu'on doit comprendre l'expédition et la signification de ces jugements, le commandement, et même la saisie-exécution, la vente des meubles saisis au plus prochain marché public, la saisie-arrêt, la saisie d'un navire, auxquels ils servent de base. 11 y a lieu également, ce me semble, d'y comprendre le pouvoir que donne l'ouvrier qui a obtenu gain de cause pour le représenter aux opérations de la faillite de son patron ; car il s'agit la encore d'un acte nécessaire à l'exécution.

Mais j'ai peine à croire que les expressions ci-dessus puissent s'étendre, notamment, à la demande portée devant letribunal civil afin d'être autorisé à vendre les meubles saisis sur les lieux mêmes ou en un autre lieu, plus avantageux que le plus prochain marché public (C. P. C, art. 617), à la demande en validité de la saisie-arrêt (art. 567), ou à la demande à l'effet d'être autorisé à procéder à la vente d'un navire saisi (C.Comm., art. 201): car ces demandes, introduites devant une juridiction nouvelle, constituent par elles-mêmes une instance nouvelle et distincte, qui doit rester régie par les règles ordinaires.

Il neparaît pas, d'ailleurs, qu'il y ait même motif. Le jugement de condamnation une fois obtenu par l'ouvrier contre son pa- tron, et passé en force de chose jugée, il en résulte au profit de l'ouvrier une créance certaine. Si l'exécution de ce jugement exige, comme conséquence de cette exécution et pour arriver à la compléter, une procédure nouvelle, devant une juridic- tion nouvelle, il n'a plus besoin de la même protection. Il ren- contrera, en effet, à cet égard, toute facilité de la part des olïiciers ministériels, qui n'ontplus à craindre son insolvabilité, les avances que peuvent nécessiter les instances nouvelles nées de l'exécution se trouvant garanties par la créance dont le recouvrement leur est confié.

Mais Tari. 2 de la loi du 7 août 1850 applique les disposi- tions de l'art, l" a aux causes du ressort des conseils de prud'hommes portées en appel ou devant la Cour de cassa- lion ». Celle extension s'explique naturellement par la raison que les causes dont il s'agit, si elles forment des instances nouvelles en tant que portées devant une juridiction supé- T.x—'.rs. 2

10 ( ART. 1877. )

Heure, ne doivent être considérées que comme une phase nouvelle de l'instance primitive, c'est-à-dire de la même in- stance.

Enfin, le timbre et l'enregistrement en débet ne sont qu'un crédit ouvert aux justiciables des conseils de prud'hommes j ce crédit ne dispense que de l'avance à faire au Trésor, il n'exonère pas du paiement des frais. Ainsi, la partie qui suc- combe doit être condamnée aux dépens envers le Trésor (L. 7 août 1850, art. 4).

Le projet de loi confiait à l'ofïîcier ministériel attaché au conseil des prud'hommes le recouvrement des droits dus au Trésoi'; mais la commissiondel'Assemblée nationale législative, chargée de l'examen de ce projet de loi, a pensé qu'il valait mieux laisser le recouvrement de ces droits à la loi commune, que d'en charger un officier ministériel complètement étranger à l'administration de l'enregistrement: de là, la disposition de l'art. 4 de la loi de 1850 portant que le recouvrement des dépens a lieu suivant les règles ordinaires contre les parties condamnées. Adrien Harel.

Art. 1377. cassation (ch. civ.), 22 juillet 1868. Ordre , ventes successives, prix non payés, dernière adjudica- tion, PRIX, ouverture, PURGE DES HYPOTÈQUES, FORMALITÉS

REMPLIES A l'Égard de l'un des créanciers inscrits seulement,

EFFETS, pourvoi EN CASSATION, DÉLAI, SIGNIFICATION A AVOUÉ.

Da7is le cas de ventes successives d'un même immeuble pour défaut de paiement par les acquéreurs de leur prix, ventes non suivies d'ouverture d'ordre, c'est le prix de la dernière ad- judication qui, seul, forme le gage commun des créanciers, et pour la distribution duquel l'ordre doit cire ouvert, encore bien que l'un des précédents acquéreurs ait rempli les forma- lités de la purge à l'égard d'un des créanciers inscrits ayant hypothèque légale, ces formalités étant sans effet à l'égard des autres créanciers (C. Nap., art. 2114, 2183, 2186 et 2195).

En matière d'ordre le délai du pourvoi en cassation court, comme celui de l'appel, à partir de la signification à avoué, contre toutes les parties, même contre celle dont l'avoué a fait la signification (L. 21 mai 1858, art. 764).

(Dame Morel C. Estignard et autres).

Le 20 déc. 1865, arrêt de la Cour de Metz qui, en ce qui concerne la première question, la résout dans le même sens par les motifs suivants :

« Attendu qu'on ne saurait adnielti'e la conclusion de la dame Morel tendant à faire composer la masse distribtiable de la somme de

( ARl'. 1377. ) i\

J ,5()l),000 fr. lormant le prix des première et seconde ventes passées au prolil des sociétés Aubé-Tronchoji et Maillard et comp.; At- tendu, en effet, que ce prix n'a jamais été réalisé et qu'aucun ordre n'a été ouvert à la suite des ventes dont il s'agit, de telle sorte que la seule valeur formant actuellement le gage commun des créanciers, eu égard aux droits de préférence qui peuvent exister entre eux, consiste dans le prix de la dernière adjudication tranchée le 3 sept. 1863; Attendu cpie la dame Morel l'a reconnu en provoquant elle- même l'expropriation des immeubles détenus par Maillard et comp., et qu'en définitive c'est sur le prix de l'adjudication dont il vient d'être parlé que l'ordre a été ouvert ; Attendu que les formalités de purge faites au nom de Maillard et comp., quels qu'en soient le caractère et la' portée, sont sans effet à l'égard des tiers créanciers qui agissent en vertu des droits réels qui leur compétent et qui sont nés antérieurement ; Atiendu qu'il ne résulte d'aucune pièce ni docu- ' ment que ces créanciers se soient mis au lieu et place de la société Maillard et comp. et soient tenus d'exécuter les engagements que cette société aurait pu prendre envers la dame Morel ; que leur posi- tion est entièrement distincte et ne peut souffrir aucune atteinte d'actes auxquels ils sont restés étrangers... »

Pourvoi en cassation contre cet arrêt, d'une part, par la dame Morel, pour violation des art. 2114, 2134, 2135,2186 et 2196, C, Nap., en ce que la Cour de Metz a méconnu les effets de la purge légale et de l'hypothèque légale de la dame Morel, et par les sieurs Eslignard et consorts. La dame Morel a opposé au pourvoi des sieurs Estignard et consorts une fin de non-recevoir tirée de ce que ledit pourvoi a été formé plus de deux mois après la signification à avoué de l'arrêt attaqué, cet arrêt ayant été rendu en matière d'ordre,

ARRÊT.

La Cocr ; En ce qui concerne le pourvoi de la dame Edouard Morel et de ses cessionnaires : Attendu, en fait, qu'Edouard Morel n'avait qu'un droit indivis, soit 328/1,000 dans les biens saisis et adjugés en 1863, et dont le prix, s'élevant à 263,870 fr., était en distribution ; Qu'en droit, l'hypothèque légale de sa femme Zélie Bastien no pouvait s'étendre au delà de cette part, et, par consé- quent, atteindre les autres 672/1,000, qui appartenaient exclusive- ment à ses trois beaux-frères ; qu'il en est du prix comme des biens qu'il représente ; qu'il se divise conformément aux droits de chacun, et que les créanciers ne peuvent y prétendre que dans la proportion que leur débiteur pourrait y prétendre lui-même; Que, dès lors, la femme d'Edouard Morel, Zélie Bastien, agissant en vertu de son liypothèque légale et comme créancière de son mari du montant de s(^s reprises, était sans droit pou)- se faire attribuer, en totalité, le

12 ( ART. 1377. )

prix en distribution, et qu'elle ne pouvait être colloquée, sur ce prix, que jusqu'à concurrence de la portion correspondant à la part, en propriété, de son débiteur, dans les biens adjugés; Attendu, quant aux formalités de la purge légale accomplies vis-à-vis de la demanderesse par la liquidation de la société Maillard, que, quels qu'en soient le caractère et la portée, elles étaient sans effet à l'égard de tiers créanciers qui, comme les commissaires à l'exécution du concordat Aube, Tronchon et comp., agissaient en vertu de droits réels, nés antérieurement à ces formalités ; qu'en le jugeant ainsi et en déboutant, par suite, ladite demanderesse et son cessionnaire de leurs conclusions, l'arrêt attaqué, loin de violer la loi, n'en a fait qu'une juste application ; Par ces motifs, rejette leur pourvoi...;

En ce qui concerne le pourvoi des commissaires à l'exécution du concordat Aube, Tronchon et comp.: Sur la fin de non-recevoir présentée par les défendeurs : Attendu qu'aux termes de l'art. 764, C.P.C., la signification à avoué des arrêts et jugements, dans les af- faires d'ordre, fait courir les délais du pourvoi en cassation; qu'en cette matière, le délai du pourvoi court, de même que celui de l'appel, à partir de la signification. à avoué contre toutes les parties les unes à l'égard des autres ; Attendu, on fait, que l'arrêt attaqué a été rendu en matière d'ordre; qu'il a été signifié, le 2 fév. 1866, par l'avoué des demandeurs en cassation aux avoués des autres parties en cause, et que le pourvoi n'a été déposé au greffe de la Cour que le 7 avril suivant; D'où il suit qu'il a été formé en dehors du délai déter- miné par la loi ; Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'y statuer au fond, rejette ledit pourvoi.

MM. Pascalis, prés.; Fauconneau-Dufresne, rapp. ; de Ray- naj, 1" av. gén. (concl. conf.); Mimerel et Groualle, av.

Observations. Tous les créanciers inscrits sur un im- meuble ont un droit égal sur cet immeuble, et, par conséquent, sur le prix qui le représente : c'est ce prix qui forme leur gage commun, sauf la préférence qui peut exister entre eux eu égard à la date de l'inscription de leur hypothèque. Mais ce prix ne peut, évidemment, s'entendre que du prix réalisé. Ainsi, lorsqu'un immeuble, grevé d'hypothèques, a été l'objet de plusieurs vente? successives par suite du non-paiement de leur prix par les divers acquéreurs, sans qu'aucun ordre ait été ouvert, le prix de la dernière adjudication peut, seul, né- cessairement devenir le gage des créanciers inscrits. C'est uniquement sur ce prix que leurs droits doivent s'exercer; c'est pour la distribution de ce prix seulement, suivant ces droits et d'après le rang qui leur appartient, que l'ordre doit être ouvert.

Le créancier hypothécaire, à l'égard duquel l'un des précé- dents acquéreurs qui n'a pas payé son prix, a rempli les for-

( ART. 1378. ) 13

uialités de la purge, ne peut prétendre que, à raison de ce fait que la Cour de Metz et la Cour de cassation ont déclaré être sans effet à l'égard des autres créanciers, il doit être colloque sur le prix de la dernière adjudication pour la même somme que celle qu'il aurait recueillie si le prix de celui des acqué- reurs qui avait rempli envers lui les formalités de la purge avait été Tobjet d'une distribution par voie d'ordre. II a été, il est vrai, décidé que l'acquéreur d'un immeuble, qui exécute les prescriptions des art. 2183 etsuiv., C. Nap., et qui, en notifiant son contrat aux créanciers inscrits, déclare être prêt à acquitter les dettes et charges hypothécaires jusqu'à concur- rence de son prix, se trouve persoonellement obligé dans cette mesure, après l'expiration des délais de la surenchère, envers les créanciers privilégiés ou hypothécaires auxquels il a fait la notification : Cass. (ch. civ.), 4 fév. 1857; Riom (2^ ch.), 2 janv. 1858. V. aussi Cass. 4 nov. 1863 [J . Av.^ t. 89 [1864]' -art. 615, p, 357), et la note. Mais le contrat qui intervient, par cette notification, entre l'acquéreur et les créanciers auxquels elle a été faite, ne peut être opposé aux autres, il ne saurait leur préjudicier. Ainsi, le prix de la dernière adjudication, qui seul, est mis en distribution, et qui est moindre que celui de la vente qui avait été faite à l'acquéreur dont le contrat n'a été notifié qu'à l'un des créanciers inscrits ayant une hypo- thèque légale, ne peut être soumis à un prélèvement de la part de ce dernier, de manière que sa collocation dans Tordre soitde lamêmesommeque celle à laquelle elle se serait élevée, si l'ordre eût été ouvert pour la distribution du prix de l'ac- quéreur ayant fait la notification.

Mais, celle notification conservant son effet au profit du créancier à qui elle a été faite, il s'ensuit que celui-ci a action contre l'acquéreur qui a accompli à son égard les formalités de la purge et qui s'est ainsi obligé à tenir compte de la tota- lité de son prix, pour le paiement de ce qui lui reste en sus du montant de sa collocation dans l'ordre ouvert pour la distribution du prix de la dernicre adjudication.

Sur laseconde solution résultanl de l'arrêt rapporté ci-dessus et dans le même sens, V. Cass. 31 mars 1862 (J. Ax,., t. 88 [1863], art. 339, p. 120), el la note. Ad. Harkl.

Art. 1378.— cassation (ch. civ.), 1" juillet 1868.

Justice de paix, interrogatoire sur faits et articles, formes, jugement préparatoire, appel.

Le juge de paix, gui ordonne qu'une partie sera interrogée par lui sur les faits articulés par sou adversaire, ne fait quuser de la faculté que lui donnent les art. 9 et 10, C.P.C, d'interpeller les parties^ qui sont obligées de comparaître de-

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vaut lui eii personne pour s'expliquer sur les faits de la con- testatioUj et, en conséquence, cette mesure n'est pas soumise aux dispositions du Code de procédure civile relatives aux formes prescrites pour les interrogatoires sur faits et articles (G.P.C., art. 324, etsuiv.).

Le jugement qui l'ordonne est purement préparatoire, et, dès lors, n'est pas susceptible d'appel avant le jugement défi- nitif {G.9.C. art. 451).

(Aribaud C. Géiin). Arrêt. La Cour ; Attendu que la procédure suivie parles parties devant le juge de paix du canton de Bone n'a pas été celle organisée par le chap. IS, C.P.C., relativement aux formes à observer pour les inter- rogatoires sur faits el articles; qu'il ne peut donc être question de l'application à la cause des disposition» relatives à cette procédure spéciale; : Attendu que le juge de paix de Bone, en ordonnant par son jugement du 22 déc. 186S, qu' Aribaud serait interrogé par lui sur les faits posés et articulés par la veuve Gélin, n'a fait qu'user de la faculté que lui donnent les art. 9 et 10, C.P.C, d'interpeller les parties qui sont obligées de comparaître devant l&i en personne pour s'expliquer sur les faits de la contestation ; Attendu que cette me- sure n'était de la part du juge de paix qu'une mesure d'instruction qui devait éclairer sa décision sur le fond, mais qui ne la préjugeait pas forcément ; Que, dès lors, le jugement attaqué a pu, dans de pareilles circonstances et sans violer aucune loi, considérer la sen- tence du 22 déc. 1865 comme étant purement préparatoire et rejeter, par suite, l'appel d'Aribaud comme étant prématuré et non recevable aux termes de l'art. 451, C.P.C; Par ces motifs, donnant défaut contre la défenderesse non comparante, rejette le pourvoi, etc.

MM. Pascalis, prés.; Rieff, rapp.; Blanche, av. gén. (concl. conf.)j Perriquet, av.

Observations. II est certain que, quoiqu'une partie soit re- présentée par un mandataire porteur d'un pouvoir spécial, le juge de paix peuttoujoursordonnerlacomparution personnelle de cette partie, dans le but d'obtenir d'elle des explications sur les faits du procès, lorsque l'instruction démontre l'utilité de cette comparution personnelle; si la partie refuse de compa- raître, le juge peut tirer de ce refus des inductions pouvant exercer une influence sur le fond du droit; et le jugement qui intervient sur le fond n'en est pas moins contradictoire, puis- que la partie est légalement représentée par son mandataire. V. en ce sens, Carré et Chauveau, Lois de la procéd., quest. 44 his et 44 ter; Bourbeau, Justice de paix, n" 465.

La comparution des parties suffit-elle toujours à la consta- tation des faits cherchés dans leur aveu ? Le juge de paix ne

( ART. 1378. ) 15

peut-il pas ordonner l'interrogatoire sur faits et articles, comme il peut ordonner la comparution?

MM. Carré et Chauveau, Lois de la procéd., quest. 44 quater, ont résolu cette question affirmativement, par la raison que l'interrogatoire présente pour celui qui l'obtient des avantages que n'offre pas la comparution, et décidé que l'interrogatoire ordonné par le juge de paix était nécessairement soumis aux dispositions du tit. 15, liv. '^■, du Code de procédure civile.

Toutefois, M. Bourbeau, Justice de paix, 519, doute que l'interrogatoire surfaits et articles puisse être placé au nombre des mesures qui sont dans le pouvoir du juge de paix. « Je ne voudrais pas affirmer, dit cet auteur, que le juge de paix commît un excès de pouvoir en cherchant la vérité par ce moyen ^ maïs je n'hésiterais pas à lui conseiller de ne pas user de ce pouvoir, si la loi ne le lui a pas refusé. »

Dans l'espèce de l'arrêt ci-dessus rapporté, le juge de paix avait cru devoir ordonner un interrogatoire sur faits et ar- ticles, et la Cour de cassation a pensé que ce n'était que l'exercice de la faculté que les art. 9 et 10, C.P.C, confèrent à ce magistrat, d'interpeller les parties qui sont obligées de comparaître devant lui en personne pour s'expliquer sur les faits de la contestation. Le juge de paix, qui ordonne la com- parution devant lui des parties en personne, peut donc les interpeller, les interroger sur tous les points qu'il croit né- cessaire d'éclaircir, et delà manière qu'il juge convenable, in- duire de leurs réponses telles conséquences qui lui paraissent en ressortir, et même si l'une d'elles refuse de s'expliquer, tenir pour avérés les faits qui sont l'objet de l'interpellation ou interrogatoire.

Si l'interrogatoire sur faits et articles n'est, en matière de justice de paix, qu'une conséquence et une application des art. 9 et 10, C.P.C , il suit delà, d'une part, que, lorsqu'un juge de paix ordonne qu'une partie sera interrogée par lui sur certains faits, il n'y a pas lieu d'observer les formes tracées par les art. 324 et suiv., C.P.C, pour les interrogatoires sur faits et articles devant les tribunaux civils, et, d'autre part, que la décision par laquelle le juge de paix ordonne cette mesure, qui n'a d'autre but que de l'éclairer sur le fond du litige, qu'elle ne préjuge en aucune façon, ne présente point d'autre caractère que celui d'une décision purement prépara- toire.

Du reste, sur la question controversée de savoir si le juge- ment qui, en matière ordinaire, ordonne un interrogatoire sur faits et articles, est préparatoire ou interlocutoire, et sus- ceptible ou non d'appel avant le jugement définitif, V. Agen, l«aoùt 1861 {J.Av).,\. 87 [1862], art. 232, p. 148), et la note.

Ad. Harel.

16 ( ART. 1879. )

Art. 1379.— MONTPELLIER (2^ ch.) , 19 juin 1868. Ordre judiciaire, jugement, appel, saisi ou débiteur discuté,

DÉFAUT DE SIGNIFICATION, INTERVENTION' A l' AUDIENCE, NULLITÉ

COUVERTE, CRÉANCIERS INTIMÉS.

La disposition de Vart. 762, L. 21 mai 1858, qui déclare nul V appel d'un jugement rendu en matière d'ordre, s'il n'a pas été signifié au saisi au domicile de son avoué, ou, à dé- faut, à soti domicile réel, s'applique à tout débiteur discuté.

Mais le saisi ou le débiteur discuté ne peuvent, en interve- nant à l'audience, couvrir, au bénéfice de l'appelant, la nul- lité résultant de ce que l'appel ne leur a pas été signifié, et dont les créanciers intimés ont, aussi bien que le saisi ou le débiteur discuté, le droit de se prévaloir.

(Hérit. Rouvière C. Moulon). Arrêt. La Cour; Considérant que , aux termes de l'art. 762, C.P.C, l'acte d'appel d'un jugement ayant statué en matière d'ordre, doit être signifié au saisi au domicile de son avoué, et, à défaut, à son domicile réel ; Et qu'il est de jurisprudence que les créanciers intimés peuvent, aussi bien que le saisi lui-même, se prévaloir devant la Cour de la nullité qui résulte de l'inobservation de cette formalité ; Considérant que la raison qui a porté le législateur à édicter la disposition ci-dessus s'applique, non-seulement au saisi, mais à tout débiteur discuté, qui doit, comme le saisi, être lié par la décision du juge supérieur, de manière à ne pas pouvoir remettre en question les points qui auraient été souverainement jugés entre les divers créan- ciers ; Considérant qu'il ne servirait de rien que, sur l'instance d'appel, ce saisi ou ce débiteur discuté fit annoncer à l'audience, ainsi que le déclare, dans l'espèce, AP Anduze, au nom des héritiers Rou- vière, qu'il est prêt à se porter partie intervenante, puisque la nullité n'en aurait pas moins été commise, et que, si quelques arrêts ont décidé que le saisi pouvait couvrir par sa représentation les irrégula- rités qui se sont glissées dans l'acte qui l'a appelé devant la Cour, on ne saurait admettre que sa comparution pût, après l'expiration des délais fixés par la loi, mettre l'appelant à l'abri de la déchéance qu'il a encourue ; Considérant que les dépens doivent suivre le sort du principal ; Par ces motifs, disant droit à l'exception présentée par Joseph-Emile Mouton, contre l'appel relevé par les héritiers Bous- quet, envers le jugement rendu le 27 août 1866 par le tribunal civil de Béziers, déclare irrecevable ledit appel comme n'ayant pas été no- tifié aux héritiers Rouvière, etc.

MM. Pegal, prés.; Petiton, av. gén.j Bédarrides et de Caba- nous, av.

Observations. En oc qui concerne la uullilé de l'appel

( ART. 137U. ) 17

d'un jugement en matière d'ordre, pour défaut de significa- tion au saisi, au domicile de son avoué, ou, à défaut, à son domicile réel, et le droit qui appartient aux créanciers inscrits intimés de se prévaloir de cette nullité, V. Nîmes, 11 juin 1865 (J. Av., t. 92 [1S67], art. 963, p. 13), et nos observa- tions.

La nullité existe encore bien que le saisi n'ait pas été partie au jugement, auquel il pouvait n'avoir aucun intérêt. V. Mont- pellier, 26 juin 1865 {J. Av., t. 91 [1866], art. 824, p. 157), et la note.

La nécessité de la signiflcation de l'appel au saisi est fon- dée sur un motif d'intérêt général ; le législateur a voulu que rien ne pût se faire sans la présence du saisi ou lui dûment appelé. La même raison s'applique à tout autre débiteur dis- cuté. L'appel d'un jugement d'ordre doit donc être, à peine de nullité, signifié à ce dernier, comme il doit l'être au saisi. €ette nullité est absolue, et l'on comprend, dès lors, que les créanciers intimés soient recevables à l'opposer.

Mais, lorsque l'exploit d'appel signifié au saisi ou au débi- teur discuté est entaché d'une nullité résultant de l'omission d'une des formalités auxquelles il est soumis, le saisi ou dé- biteur discuté peut par sa comparution et son silence couvrir cette nullité, qui, en effet, n'est pas, comme le défaut de si- gnification, une nullité absolue, mais une nullité relative, et les créanciers intimés ne peuvent être admis à s'en prévaloir. V. Cass. U juin 1861 {J. Av., t. 89 [1864], art. 554, p. 395).

De même, il semble que les créanciers intimés sont sans droit à exciper de l'omission par l'appelant de la signification de l'appel au saisi, lorsque l'un d'eux ou l'un des appelants a réparé cette omission, avant l'expiration des délais d'appel, par la dénonciation de l'appel au saisi, avec assignation de- vant la Cour. V., en ce sens, Cass. 14 juin 1864 (arrêt précité), et nos observations in fine. Car, aux yeux des créanciers inti- més, le saisi est régulièrement appelé par la dénonciation qui lui est faite de l'appel. V., toutefois, Montpellier, 26 juin 1865 (arrêt également précité).

Mais le défaut de signification de l'appel au saisi ou débi- teur discuté, non suppléé par aucune dénonciation de l'appel, fait encourir à l'appelant une déchéance absolue, qui existe aussi bien à l'égard des créanciers intimés qu'à l'égard du saisi ou débiteur discuté; cette déchéance entraîne la nullité de la procédure; le droit d'en exciper est acquis à tous ceux qui y sont parties, par conséquent, aux créanciers intimés ; et l'on conçoit, alors, que, comme l'a décidé l'arrêt, ci-dessus rapporté, de la Cour de Montpellier, le saisi ou débiteur dis- cuté ne puisse, en intervenant dans l'instance, couvrir une nullité de procédure qui ne lui est pas exclusivement person-

18 ( ARY. 1380. )

rielle et relever l'appelant d'une déchéance qui profile à tous les intéressés. Ad. Harel.

Art. 4380.— cassation (ch. req.), 10 mars 1868. Enquête, témoin, reproche, intérêt éventuel, juges, apprécia- tion SOUVERAINE.

L'admission, contre un témoin, de reproches autres que ceux spécifiés par la loi, est abandonnée à l'appréciation sou- veraine des juges du fait (G. P. G., art. 283),

Ainsi, l'intérêt du témoin dans une contestation, fondé sur ce qu'il pourrait avoir un 'procès idcntiqiie avec le défendeur, est un intérêt éventuel qui peut être considéré comme n'étant pas une cause suffisante de reproche.

(Lavasseur C. Ghevallier et autres).

Le 12 juin 1865, jugement du tribunal civil des Àndelys qui, dans l'espèce, rejette le reproche par les motifs suivants :

« Considérant que, si les dispositions de l'art. 283, C.P.C, sont démonstratives et non limitatives, il faut néanmoins reconnaître que cet article a prévu la généralité des cas de reproches ; Qu'il en résulte qu'il n'est permis d'en admettre d'autres qu'avec une extrême réserve et dans les cas d'analogie avec ceux indiqués par cet article ; Qu'il est constant qu'au nombre des causes de reproche qui peu- vent être admises, autres que celles énumérées dans l'art. 283, il faut compter l'intérêt du témoin; mais qu'il faut alors que cet intéri^* soit direct, personnel, immédiat dans la contestation ; qu'il est biei allégué et non méconnu, du reste, que les témoins reprochés sont ac- tionnaires dans la compagnie The international agency company, mais qu'on ne saurait, en se fondant sur la maxime : Nemo idoneus testis in re suâ, les reprocher, par exemple, en soutenant qu'ils se- raient les associés des demandeurs (1) et auraient ainsi un intérêt plus ou moins direct dans la contestation ; Qu'il est bien vrai qu'ultérieurement les témoins pourraient avoir un procès identique avec le défendeur, et qu'ainsi la décision à intervenir, quelle qu'elle

(-1) Dans l'espèce, plusieurs actionnaires de la société anglaise dont il s'agit avaient formé contre le sieur Levasseur, banquier, par l'intermédiaire duquel ils avaient souscrit des actions, une action